Vacances brisées, garde à vue, centre de rétention administrative et une préfecture forcée à rendre un passeport sous astreinte de 300€ par heure de retard
- samydjemaoun
- 29 avr.
- 3 min de lecture
Dernière mise à jour : 30 avr.
Mon client, ressortissant nigérian titulaire d’un visa Schengen valide, arrive à Amsterdam le 15 avril 2025 pour ses vacances. Deux jours plus tard, il rejoint Paris pour retrouver un ami dans un hôtel réservé par une agence tierce.

À leur arrivée, la gérante exige la carte bancaire utilisée pour la réservation. Surprise : la réservation a été effectuée avec une carte volée. La personne titulaire de cette carte ayant reçu une alerte de prélèvement se rend à l’hôtel pour comprendre pourquoi elle avait un prélèvement de 2500€ sur son compte…La gérante appelle alors la police, qui interpelle mon client et son ami pour escroquerie présumée.
S’en suivent 48 heures de garde à vue. Finalement, le procureur classe l’affaire sans suite, reconnaissant que mon client et son ami sont eux-mêmes victimes de cette escroquerie.
Le 19 avril 2025, à leur sortie du commissariat, tout bascule :
· L’ami, pourtant résident régulier au Royaume-Uni, se voit notifier une Obligation de Quitter le Territoire Français (OQTF) et une Interdiction de Retour sur le Territoire Français (IRTF).
· Mon client reçoit la même sanction ainsi qu’un placement en centre de rétention administrative.
Je conteste l’OQTF et l’IRTF au fond devant le tribunal administratif de Melun.
La course contre la montre commence
Pendant sa rétention, la préfecture de police confisque son passeport. Après de nombreuses démarches.
Le 24 avril 2025, non sans difficultés, j’obtiens sa libération du centre de rétention administrative par le juge des libertés et la détention.
Les vacances de mon lcient ayant été interrompu par son passage CRA, il avait un vol prévu le 27 avril 2025 pour Cancun, avec un retour à Amsterdam le 8 mai 2025, avant de rentrer au Nigéria le même jour. Toutes ses réservations (hôtel et activités) étaient en règle.
Mais sans passeport, impossible pour lui de voyager.
Le 25 avril à 16h33, moins de 48h avant son vol, je saisis le juge des référés sur le fondement de l’article L.521-2 du code de justice administrative, demandant :
· La restitution immédiate de son passeport sous astreinte de 300€/heure de retard,
· La suspension de l’IRTF,
· Et la suppression temporaire de son inscription au fichier SIS (Système d’Information Schengen), afin qu’il puisse rentrer transiter à Amsterdam pour revenir au Nigéria, sans délai à compter de la notification de l’ordonnance à intervenir et sous astreinte de 300 euros par heure de retard.
L’audience : report, victoire… et mise sous pression
Prévue pour le 26 avril 2025 à 15h, l’audience est finalement renvoyée au 28 avril, la préfecture n’ayant pas ouvert ma requête.
Le 28 avril 2025, la juge des référés constate :
L’existence d’une situation d’urgence : mon client doit impérativement prendre son vol le 29 avril ;
Aucune justification par le préfet pour retenir le passeport ;
Atteinte grave et manifestement illégale à la liberté fondamentale d’aller et venir; Mon client dispose d’un visa Schengen valide jusqu’en juin 2025, délivré par la Grèce, sans infraction aux conditions de séjour;
L’obligation de quitter le territoire repose sur un motif erroné;
L’enquête pour escroquerie a été classée sans suite, écartant tout risque pour l’ordre public;
Son inscription au SIS, en l’état, entraverait indûment son retour au Nigéria, car qu’il doit revenir à Amsterdam (donc dans l’espace Schengen) après ses vacances au Mexique pour retourner au Nigéria le 7 mai 2025.
Conclusion : la juge ordonne :
La restitution du passeport sous 3 heures, sous peine d’une astreinte de 300€ par heure de retard : la préfecture devra payer 300€ par heure tant qu’elle ne restitue pas le passeport.
La suppression immédiate de l’inscription au fichier SIS, également sous 3h mais sans astreinte.
L’administration sous pression : un dénouement accéléré
La préfecture a ouvert l’ordonnance le 28 avril 2025 à 17h41, ce qui signifiait que l'astreinte de 300€ par heure commençait à courir à partir de 20h41.
Je leur ai adressé un mail clair : si mon client n’était pas convoqué à 9h le 29 avril pour la restitution du passeport et la suppression du fichage SIS, je ressaisirais le juge pour demander la liquidation de l’astreinte à hauteur de 7200€.
Ce matin, 9h32 la préfecture a réagi : mon client a été immédiatement convoqué. Son passeport lui a été restitué et son inscription au SIS a été supprimée.
Il pourra ainsi poursuivre ses vacances et rentrer dans son pays comme prévu.
Pas sûr en revanche qu'il puisse prendre son vol à 13h30 au départ d'Amsterdam.




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